La gestion fiscale du Plan d’Épargne Retraite (PER) constitue un enjeu majeur pour les épargnants souhaitant optimiser leur préparation financière à la retraite. Parmi les subtilités de ce dispositif, le traitement fiscal des versements non déductibles à la sortie mérite une attention particulière. En effet, contrairement aux versements déductibles qui bénéficient d’un avantage fiscal immédiat mais sont taxés à la sortie, les versements non déductibles suivent une logique différente. Cette spécificité, souvent méconnue, peut représenter un levier d’optimisation fiscale considérable dans certaines situations. Cet examen approfondi vise à clarifier les mécanismes fiscaux applicables à ces versements particuliers, depuis leur réalisation jusqu’à leur récupération, en passant par les stratégies d’optimisation adaptées à différents profils d’épargnants.
Comprendre les fondamentaux des versements non déductibles sur le PER
Les versements sur un Plan d’Épargne Retraite peuvent être effectués de deux manières distinctes : soit en optant pour la déductibilité fiscale, soit en renonçant volontairement à cette déduction. Cette dernière option, moins connue, présente pourtant des avantages stratégiques dans certaines configurations patrimoniales.
Un versement non déductible correspond à une somme déposée sur le PER pour laquelle le titulaire renonce expressément à l’avantage fiscal normalement accordé. En pratique, cette renonciation s’effectue au moment de la déclaration de revenus en ne mentionnant pas ces sommes dans les cases dédiées aux versements déductibles. Cette démarche volontaire modifie profondément le traitement fiscal ultérieur de ces sommes.
La législation fiscale encadrant ces versements non déductibles trouve son fondement dans l’article 158-5-b quinquies du Code Général des Impôts ainsi que dans divers textes réglementaires et instructions fiscales. Ces dispositions établissent un régime spécifique qui distingue clairement le sort fiscal des versements selon qu’ils ont été déduits ou non à l’entrée.
Pour distinguer les versements déductibles des non déductibles, les assureurs et gestionnaires de PER tiennent une comptabilité précise des sommes versées avec leur qualification fiscale. Cette traçabilité est fondamentale puisqu’elle déterminera, parfois des décennies plus tard, le régime fiscal applicable lors de la récupération des fonds.
Distinction technique entre versements obligatoires et volontaires
Au sein du PER, il convient de distinguer différents compartiments :
- Le compartiment des versements volontaires (déductibles ou non)
- Le compartiment des versements obligatoires
- Le compartiment de l’épargne salariale (intéressement, participation, abondement)
Seuls les versements volontaires peuvent faire l’objet d’une renonciation à la déductibilité. Les versements obligatoires, effectués dans le cadre d’un PER Obligatoire (ancien article 83) sont systématiquement déductibles, sans possibilité d’y renoncer. Cette distinction technique joue un rôle déterminant dans les stratégies d’optimisation fiscale.
Les plafonds de déductibilité, calculés selon les règles prévues aux articles 163 quatervicies et 83-1° quater du Code Général des Impôts, déterminent le montant maximum pouvant être déduit du revenu imposable. Ces plafonds s’élèvent en 2023 à 10% des revenus professionnels plafonnés à 8 PASS (Plafond Annuel de la Sécurité Sociale) pour les salariés, soit un maximum de 32 909 euros. Pour les travailleurs non-salariés, ce plafond peut atteindre 76 102 euros.
La décision de ne pas déduire des versements peut résulter d’un choix stratégique ou d’un dépassement de ces plafonds. Dans tous les cas, cette décision doit être mûrement réfléchie car elle engage le traitement fiscal futur des sommes concernées.
Régime fiscal des versements non déductibles lors de la phase d’épargne
Durant la phase de constitution de l’épargne, les versements non déductibles présentent des particularités fiscales qui les distinguent nettement des versements ayant bénéficié d’une déduction.
Contrairement aux versements déductibles qui permettent une réduction immédiate de l’assiette imposable à l’impôt sur le revenu, les versements non déductibles sont réalisés avec des sommes déjà soumises à l’imposition. Concrètement, un contribuable imposé dans la tranche marginale à 30% qui verse 10 000 euros de manière non déductible sur son PER aura préalablement acquitté environ 3 000 euros d’impôts sur cette somme, contrairement à un versement déductible qui lui aurait permis d’économiser ce montant.
L’absence d’avantage fiscal immédiat constitue donc le principal inconvénient de cette stratégie. Toutefois, cette apparente pénalité initiale se transforme en avantage lors de la phase de récupération des fonds, créant ainsi un mécanisme d’arbitrage fiscal entre le présent et le futur.
Impact sur l’IFI et autres impositions patrimoniales
Durant la phase d’épargne, les versements non déductibles, tout comme les versements déductibles, bénéficient d’une exonération d’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) lorsque le PER est investi en unités de compte. Cette caractéristique renforce l’attrait de ce placement pour les contribuables disposant d’un patrimoine immobilier conséquent.
En matière de droits de succession, le PER suit le régime classique de l’assurance-vie pour sa partie en gestion assurantielle, avec des abattements spécifiques selon l’âge du souscripteur lors des versements. La distinction entre versements déductibles et non déductibles n’a pas d’incidence sur ce plan.
Les plus-values générées par les versements, qu’ils soient déductibles ou non, bénéficient d’une exonération d’imposition pendant toute la phase de capitalisation. Cette neutralité fiscale constitue un atout majeur du PER par rapport à d’autres enveloppes d’investissement.
Un aspect souvent négligé concerne le traitement des versements non déductibles vis-à-vis des prélèvements sociaux. Quelle que soit la nature fiscale des versements, les gains réalisés dans le PER ne supportent pas les prélèvements sociaux (actuellement fixés à 17,2%) pendant la phase d’épargne, contrairement à d’autres placements comme l’assurance-vie ou les comptes-titres qui subissent ces prélèvements annuellement ou lors des retraits.
Cette absence de fiscalité sur les gains en cours de constitution représente un avantage comparatif substantiel, particulièrement pour les horizons de placement longs, typiques de l’épargne-retraite. L’effet de capitalisation sans ponction fiscale renforce considérablement le potentiel de croissance du capital investi.
Pour les contribuables ayant atteint leurs plafonds de déductibilité, les versements non déductibles offrent ainsi une solution pour continuer à alimenter leur épargne-retraite tout en bénéficiant de l’environnement fiscal protecteur du PER pendant la phase d’accumulation.
Traitement fiscal spécifique des versements non déductibles à la sortie en capital
La véritable particularité des versements non déductibles se révèle lors de la phase de récupération des fonds, notamment dans le cas d’une sortie en capital. Le principe fondamental qui régit cette fiscalité repose sur l’absence de double imposition : puisque ces sommes ont déjà été taxées lors de leur constitution, elles bénéficient d’un traitement privilégié à la sortie.
Lors d’une sortie en capital, le régime fiscal opère une distinction claire entre :
- Le capital constitué par les versements non déductibles
- Les plus-values générées par ces versements
Le capital correspondant aux versements non déductibles est totalement exonéré d’impôt sur le revenu. Cette exonération constitue l’avantage majeur de cette stratégie, particulièrement pour les épargnants anticipant une pression fiscale élevée à la retraite.
En revanche, les plus-values issues de ces versements sont soumises à la fiscalité des produits de placement. Concrètement, elles supportent :
Le Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) au taux de 30%, décomposé en 12,8% d’impôt sur le revenu et 17,2% de prélèvements sociaux. Alternativement, le contribuable peut opter pour l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu (plus avantageux pour les tranches inférieures) tout en conservant les 17,2% de prélèvements sociaux.
Cette mécanique fiscale diffère radicalement de celle applicable aux versements déductibles, pour lesquels l’intégralité du capital récupéré (versements initiaux et plus-values) est soumise au barème progressif de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des pensions et retraites, avec application d’un abattement de 10%.
Calcul pratique et exemples chiffrés
Pour illustrer concrètement ce mécanisme, prenons l’exemple d’un épargnant ayant réalisé des versements non déductibles de 50 000 euros sur son PER. Après 15 ans, ces versements ont généré 20 000 euros de plus-values, portant le capital total à 70 000 euros.
En cas de sortie en capital :
- Les 50 000 euros correspondant aux versements initiaux sont totalement exonérés d’impôt sur le revenu
- Les 20 000 euros de plus-values sont soumis au PFU de 30%, soit une imposition de 6 000 euros
L’imposition totale s’élève donc à 6 000 euros, ce qui représente un taux effectif d’imposition de 8,57% sur l’ensemble du capital récupéré.
À titre de comparaison, si ces mêmes versements avaient été déductibles, l’intégralité des 70 000 euros aurait été soumise au barème progressif. Pour un retraité imposé dans la tranche marginale à 30%, et après application de l’abattement de 10%, l’impôt aurait atteint environ 18 900 euros, soit un taux effectif d’imposition de 27%.
La différence d’imposition entre ces deux stratégies peut donc s’avérer considérable, particulièrement pour les contribuables qui anticipent une tranche marginale d’imposition élevée à la retraite. Toutefois, cette analyse doit être nuancée par l’avantage fiscal initial obtenu avec les versements déductibles.
Dans la pratique, les gestionnaires de PER doivent tenir une comptabilité précise distinguant les versements déductibles des non déductibles, ainsi que les plus-values associées à chaque catégorie. Cette traçabilité est fondamentale pour déterminer correctement la fiscalité applicable lors des retraits.
Modalités de sortie en rente viagère et impact fiscal des versements non déductibles
Si la sortie en capital met en lumière les avantages fiscaux des versements non déductibles, la sortie en rente viagère présente des spécificités propres qui méritent une analyse approfondie. Le traitement fiscal de la rente issue de versements non déductibles répond à une logique différente mais tout aussi avantageuse dans certaines configurations.
Lorsque le titulaire d’un PER opte pour une sortie en rente viagère, la fiscalité applicable aux rentes issues de versements non déductibles suit le régime des rentes viagères à titre onéreux (RVTO), conformément aux dispositions de l’article 158-6 du Code Général des Impôts.
Ce régime prévoit une imposition partielle de la rente, selon un barème dégressif en fonction de l’âge du bénéficiaire au moment de l’entrée en jouissance de la rente :
- 70% du montant de la rente est imposable si le bénéficiaire a moins de 50 ans
- 50% du montant de la rente est imposable si le bénéficiaire a entre 50 et 59 ans
- 40% du montant de la rente est imposable si le bénéficiaire a entre 60 et 69 ans
- 30% du montant de la rente est imposable si le bénéficiaire a 70 ans ou plus
Ce barème avantageux reflète la logique fiscale selon laquelle une partie de la rente correspond au remboursement du capital (déjà taxé pour les versements non déductibles), tandis que l’autre partie représente des produits imposables.
En comparaison, les rentes issues de versements déductibles sont intégralement soumises au barème progressif de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des pensions et retraites, avec application de l’abattement de 10% plafonné (3 912 euros pour les revenus de 2023).
Concernant les prélèvements sociaux, les rentes viagères à titre onéreux sont soumises aux prélèvements sociaux au taux de 17,2%, mais uniquement sur la fraction imposable de la rente. Ainsi, pour un retraité de 65 ans, seuls 40% de sa rente supporteront les prélèvements sociaux, ce qui réduit considérablement la pression fiscale globale.
Comparaison chiffrée entre rentes issues de versements déductibles et non déductibles
Pour illustrer l’impact de ces différences de traitement fiscal, considérons un retraité de 65 ans percevant une rente annuelle de 10 000 euros :
Si cette rente provient intégralement de versements déductibles :
- Imposition au barème progressif sur 10 000 euros (moins l’abattement de 10%)
- Pour un taux marginal d’imposition de 30%, l’impôt s’élèverait à environ 2 700 euros
- Prélèvements sociaux de 9,1% (taux applicable aux pensions) : 910 euros
- Charge fiscale totale : 3 610 euros, soit 36,1% de la rente
Si cette rente provient intégralement de versements non déductibles (RVTO) :
- Fraction imposable : 40% de 10 000 euros, soit 4 000 euros
- Pour un taux marginal d’imposition de 30%, l’impôt s’élèverait à environ 1 200 euros
- Prélèvements sociaux de 17,2% sur la fraction imposable : 688 euros
- Charge fiscale totale : 1 888 euros, soit 18,9% de la rente
La différence de traitement fiscal génère dans cet exemple une économie de plus de 17 points de pourcentage sur le taux effectif d’imposition, ce qui représente un gain substantiel sur la durée de versement de la rente.
Il convient de noter que la conversion en rente est réalisée par l’assureur selon des tables de mortalité réglementaires et un taux technique qui influencent le montant de la rente servie. Ces paramètres techniques sont identiques quelle que soit la nature fiscale des versements à l’origine. La différence réside exclusivement dans le traitement fiscal de la rente servie.
Stratégies d’optimisation combinant versements déductibles et non déductibles
La coexistence possible de versements déductibles et non déductibles au sein d’un même PER ouvre la voie à des stratégies d’optimisation fiscale sophistiquées. Ces approches mixtes permettent d’adapter finement la structure de l’épargne-retraite aux spécificités de chaque situation patrimoniale et à l’évolution prévisible de la pression fiscale.
La première stratégie consiste à moduler dans le temps la nature fiscale des versements en fonction de l’évolution de la situation du contribuable. Ainsi, un contribuable fortement imposé durant sa vie active aura généralement intérêt à privilégier les versements déductibles pour maximiser l’économie d’impôt immédiate. À l’inverse, lors des années où sa tranche marginale d’imposition est plus faible (début de carrière, année sabbatique, transition professionnelle), les versements non déductibles peuvent s’avérer plus pertinents.
Cette modulation temporelle permet d’optimiser le rapport entre l’avantage fiscal à l’entrée et la fiscalité à la sortie, en tenant compte de l’effet de levier fiscal généré par la différence entre le taux marginal d’imposition pendant la phase d’épargne et celui applicable lors de la retraite.
Segmentation des versements selon l’horizon et le mode de sortie envisagé
Une approche plus élaborée consiste à segmenter les versements selon l’horizon et le mode de sortie envisagé :
- Pour la part d’épargne destinée à une sortie en capital à court ou moyen terme (par exemple dans le cadre d’un projet d’acquisition de résidence principale), les versements non déductibles peuvent être privilégiés pour leur traitement fiscal avantageux à la sortie
- Pour la part destinée à générer un complément de revenu régulier à long terme sous forme de rente, l’arbitrage dépendra de l’évolution anticipée du taux marginal d’imposition à la retraite
Cette segmentation peut s’accompagner d’une différenciation des supports d’investissement. Les versements non déductibles, destinés prioritairement à une sortie en capital, peuvent être orientés vers des supports plus dynamiques visant la génération de plus-values, tandis que les versements déductibles peuvent privilégier des supports plus sécurisés visant la constitution d’un capital stable pour la conversion en rente.
L’optimisation peut également intégrer une dimension familiale, en coordonnant les versements déductibles et non déductibles entre conjoints. Cette approche est particulièrement pertinente lorsque les conjoints présentent des tranches marginales d’imposition différentes ou des perspectives d’évolution de revenus distinctes.
Cas particulier des hauts revenus et du plafonnement des niches fiscales
Pour les contribuables à hauts revenus, les versements non déductibles présentent un avantage spécifique lié au plafonnement global des niches fiscales. En effet, contrairement aux versements déductibles qui génèrent un avantage fiscal soumis au plafonnement global (10 000 euros par an), les versements non déductibles n’entrent pas dans ce mécanisme de plafonnement.
Cette caractéristique permet aux contribuables ayant saturé leurs niches fiscales de continuer à optimiser leur préparation à la retraite en réalisant des versements non déductibles, tout en préservant leurs autres avantages fiscaux (investissements Pinel, emplois à domicile, etc.).
De même, pour les contribuables soumis à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), les versements non déductibles peuvent constituer une stratégie intéressante. Contrairement aux versements déductibles qui réduisent l’assiette de l’impôt sur le revenu mais pas celle de la CEHR, les versements non déductibles n’ont pas d’impact immédiat sur la fiscalité mais génèrent un avantage fiscal à la sortie, y compris au regard de la CEHR si la situation fiscale du contribuable a évolué entretemps.
Aspects pratiques et points de vigilance pour une gestion optimale
La mise en œuvre d’une stratégie impliquant des versements non déductibles nécessite une attention particulière à plusieurs aspects pratiques et points de vigilance pour garantir son efficacité à long terme.
La traçabilité fiscale des versements constitue l’enjeu primordial de cette approche. Il est indispensable de conserver tous les justificatifs relatifs aux versements effectués et à leur qualification fiscale (déductible ou non déductible). Cette documentation comprend :
- Les avis d’imposition mentionnant les montants déduits
- Les relevés annuels du PER détaillant les versements effectués
- Les déclarations préalables de renonciation à la déductibilité, le cas échéant
Cette traçabilité est d’autant plus cruciale que l’écart temporel entre les versements et leur récupération peut atteindre plusieurs décennies, période pendant laquelle des changements de gestionnaire, des transferts de contrat ou des évolutions réglementaires peuvent survenir.
Les gestionnaires de PER ont l’obligation légale de tenir une comptabilité distincte des versements selon leur nature fiscale. Toutefois, il est recommandé au titulaire de vérifier régulièrement l’exactitude de cette comptabilisation, particulièrement lors des opérations de transfert entre établissements qui peuvent parfois s’accompagner de pertes d’informations.
Anticipation des évolutions réglementaires et fiscales
La stabilité du cadre fiscal constitue un autre point d’attention majeur. La stratégie des versements non déductibles repose sur l’anticipation d’un traitement fiscal favorable à la sortie, parfois plusieurs décennies après les versements. Or, le droit fiscal est par nature évolutif, et des modifications législatives peuvent intervenir entre-temps.
Si le principe de non-rétroactivité fiscale offre une certaine protection, l’histoire fiscale française montre que des ajustements peuvent affecter le traitement des produits d’épargne sur le long terme. Il convient donc d’intégrer cette incertitude dans la réflexion stratégique et de ne pas fonder une décision exclusivement sur les avantages fiscaux actuels.
La liquidation partielle du PER représente une option stratégique intéressante pour les contrats comportant à la fois des versements déductibles et non déductibles. Cette faculté permet de piloter finement la fiscalité des retraits en choisissant la nature des versements à liquider en priorité selon les besoins et le contexte fiscal du moment.
Toutefois, cette souplesse théorique se heurte parfois à des contraintes opérationnelles chez certains gestionnaires dont les systèmes d’information ne sont pas toujours adaptés à cette gestion fine des compartiments fiscaux. Il est donc recommandé de vérifier préalablement les possibilités techniques offertes par le gestionnaire en matière de liquidation sélective.
Coordination avec les autres dispositifs d’épargne-retraite
L’articulation du PER avec les autres dispositifs d’épargne-retraite constitue un enjeu d’optimisation globale. Pour les travailleurs indépendants notamment, la coordination entre le PER, le Madelin et éventuellement un contrat article 83 pour les activités salariées complémentaires peut s’avérer complexe.
Cette coordination doit tenir compte des plafonds de déductibilité spécifiques à chaque dispositif et de leur fongibilité partielle. La réalisation de versements non déductibles peut constituer une solution pertinente une fois les plafonds de déductibilité saturés sur l’ensemble des dispositifs disponibles.
Enfin, la question de l’information aux bénéficiaires revêt une importance particulière dans le cas des versements non déductibles. En cas de décès du titulaire avant la liquidation du PER, les bénéficiaires désignés doivent être informés de la nature fiscale des versements pour pouvoir bénéficier du traitement fiscal approprié lors de la perception des capitaux décès.
Cette transmission d’information peut s’avérer délicate, particulièrement lorsque la documentation originale n’a pas été conservée ou transmise. Il peut donc être judicieux d’intégrer ces éléments dans un document de transmission patrimoniale plus global (lettre aux héritiers, mémorandum patrimonial, etc.) pour garantir la bonne application du régime fiscal spécifique aux versements non déductibles.
Perspectives d’évolution et adaptation aux changements de situation personnelle
La stratégie fiscale intégrant des versements non déductibles s’inscrit nécessairement dans une perspective de long terme, ce qui implique d’anticiper les évolutions possibles tant au niveau personnel que réglementaire.
L’évolution de la situation professionnelle du titulaire constitue un premier facteur d’adaptation. Les transitions de carrière, les périodes de chômage, les expatriations ou les changements de statut professionnel (passage du salariat à l’indépendance ou inversement) modifient profondément les paramètres fiscaux à prendre en compte.
Ces modifications peuvent justifier un ajustement de la stratégie initiale. Par exemple, un salarié optant pour le statut d’indépendant verra son plafond de déductibilité augmenter significativement, rendant potentiellement plus attractive l’option des versements déductibles. À l’inverse, une expatriation dans un pays à fiscalité réduite peut temporairement favoriser les versements non déductibles.
La mobilité internationale constitue d’ailleurs un cas particulier complexe. Les conventions fiscales internationales peuvent modifier substantiellement le traitement fiscal du PER, tant pour les versements que pour les sorties. Dans certaines configurations, les versements non déductibles peuvent s’avérer particulièrement pertinents pour les expatriés prévoyant un retour en France à la retraite.
Adaptation aux évolutions de la fiscalité et des dispositifs d’épargne-retraite
Les réformes fiscales successives imposent une vigilance constante et une capacité d’adaptation. L’histoire récente de la fiscalité française montre que les dispositifs d’épargne-retraite ont connu des évolutions significatives : transformation du PERP et du Madelin en PER, modification des conditions de sortie, évolution des taux d’imposition…
Cette instabilité réglementaire plaide pour une diversification des approches fiscales au sein même de l’épargne-retraite, les versements non déductibles constituant un élément de cette diversification. En répartissant les versements entre différents régimes fiscaux, le titulaire se prémunit partiellement contre le risque de voir l’intégralité de son épargne-retraite affectée par une réforme défavorable.
La réversibilité partielle des choix fiscaux constitue également un atout. Si le choix de la non-déductibilité est irréversible pour un versement donné, rien n’empêche d’adopter une stratégie différente pour les versements futurs. Cette souplesse permet d’ajuster progressivement la stratégie en fonction des évolutions constatées ou anticipées.
Les perspectives d’évolution du taux de prélèvement forfaitaire unique (PFU) méritent une attention particulière. Ce taux, actuellement fixé à 30%, conditionne la fiscalité des plus-values issues de versements non déductibles lors d’une sortie en capital. Toute modification de ce taux aurait un impact direct sur l’attractivité relative des versements non déductibles par rapport aux versements déductibles.
Intégration dans une stratégie patrimoniale globale
L’optimisation des versements non déductibles prend tout son sens lorsqu’elle s’intègre dans une stratégie patrimoniale globale. Cette approche holistique implique de coordonner le PER avec les autres compartiments du patrimoine :
- L’immobilier (résidence principale, investissement locatif)
- L’assurance-vie et les autres enveloppes de capitalisation
- Les investissements directs (valeurs mobilières, participations)
Cette coordination doit tenir compte des objectifs patrimoniaux à long terme, notamment en matière de transmission. Les versements non déductibles peuvent s’inscrire dans une logique de préparation de la transmission patrimoniale, en complément d’autres dispositifs comme les donations ou le démembrement de propriété.
Le recours à un conseil spécialisé en ingénierie patrimoniale s’avère souvent pertinent pour définir et ajuster cette stratégie globale. La complexité des interactions entre les différents dispositifs et leur fiscalité respective justifie un accompagnement professionnel, particulièrement pour les patrimoines significatifs ou présentant des caractéristiques atypiques.
En définitive, la question des versements non déductibles illustre parfaitement la nécessité d’une approche dynamique et personnalisée de la préparation financière à la retraite. Au-delà des schémas standardisés, c’est bien l’adaptation fine aux spécificités de chaque situation patrimoniale et à son évolution prévisible qui permet d’optimiser véritablement l’efficacité fiscale de l’épargne-retraite.
